Si vous êtes victime d’un traumatisme crânien cérébral, l’enjeu de l’expertise médicale va être d’évaluer vos lésions. En effet il existe ce qu’on appelle le handicap invisible.
Comme son nom l’indique, il s’agit d’un handicap donc il est particulièrement difficile d’évaluer son existence dans le cadre d’une mission classique d’expertise. La finalité d’une expertise est toujours d’évaluer le dommage corporel de la victime.
C’est la raison pour laquelle la mission doit être suffisamment précise et donner tous les moyens nécessaires à l’expert pour pouvoir l’amener à son but. Le but est le suivant, permettre aux magistrats qui sont des juristes et non pas des médecins, ainsi qu’aux parties, d’avoir un maximum d’informations techniques leur permettant de rendre une décision juste et qui corresponde à une réalité. La réalité de la victime est de vivre avec un handicap certain mais dont il est difficile d’établir le lien de causalité avec l’accident.
En réalité l’entourage de la victime n’aura aucune difficulté à vous expliquer la réalité des conséquences de l’accident sur la victime.
Mais c’est davantage du côté des compagnies d’assurance qui vont contester cette réalité qu’il convient de se pencher. En effet, les limites de l’imagerie actuelle sont une source indéniable de précarité pour les victimes d’accidents et de traumatisme crânien.
Il convient de faire des examens spécifiques, croiser les informations, pour pouvoir établir les conséquences d’un traumatisme crânien.
C’est surtout le cas lorsqu’il s’agit d’un traumatisme crânien léger. En effet pour les traumatismes très important, les séquelles peuvent s’observer sur des IRM.
C’est beaucoup plus difficile dans le cadre d’un traumatisme crânien léger car les imageries manquent encore de précision. Pour autant et en respectant un certain nombre de protocoles, on peut tout de même déceler ces lésions qui sont bien réelles.
Sur la compétence de l’expert qui devra mettre en oeuvre la mission :
Tout d’abord, il faut que la victime soit examinée par un professionnel averti et en mesure de détecter le » handicap invisible « . Aussi il est recommandé que l’expert soit un clinicien, c’est à dire qu’il soit spécialiste en exercice mais aussi expert médical. Ce point pourrait sembler anodin mais il ne l’est pas.
En effet nombreux sont les experts qui n’exercent plus vraiment la charge médicale et les soins des patients mais qui sont uniquement spécialisés dans l’évaluation. En s’écartant du terrain, ce type d’experts peuvent passer à côté d’une évaluation juste et réelle du handicap d’une victime. Et c’est malheureusement souvent le cas pour les traumatisés cérébraux.
Aussi voici le type de mission qui pourrait être proposée à l’expert pour pouvoir évaluer un traumatisme crânien cérébral.
En raison de l’anosognosique souvent constatée chez ces victimes, il est important que l’expert ne se limite pas à l’évaluation stricto sensu de la victime. Il devra également recueillir les doléances de l’entourage du patient. L’anosognosie est un trouble neuropsychologique qui fait qu’un patient atteint d’une maladie ou d’un handicap ne semble pas avoir conscience de sa condition.
L’expert devra également décrire le déroulement d’une journée type afin de mieux apprécier les conséquences des séquelles pour la victime et son entourage, qui est une victime indirecte de l’accident.
Ceci va permettre, in fine, d’évaluer ses besoins en tierce personne.
Parmi les éléments à évaluer, il y aura non seulement les actes simples de la vie quotidienne, qui peuvent être surmontés par certains traumatisés crâniens mais surtout des actes plus élaborés. On pense en particularité à la gestion administrative d’un budget ou l’organisation d’un dîner par exemple.
L’objectif est d’évaluer la victime dans des situations non encadrées qui nécessitent organisation, mais aussi adaptation. Ce qui est une situation très difficile pour les patients traumatisés crâniens.
En recueillant les doléances actuelles de la victime et de ses proches, en l’interrogeant sur les conditions d’apparition des douleurs et de la gêne fonctionnelle, sur leur
importance et sur leurs conséquences, l’expert va pouvoir, par ce biais, comparer les besoins, qui sont souvent différents.
L’anosognosie perturbant cette auto évaluation de la part de la victime, l’apport de l’entourage est très important sur ce point.
En interrogeant la victime et ses proches sur la vie antérieure à l’accident, l’expert va disposer d’information importante pour bien évaluer l’accidenté.
L’importance des bilans neuro-psychologiques chez le traumatisé crânien
Les bilans neuropsychologiques vont également être un apport important pour permettre à l’expert de bien évaluer le handicap. Ils vont permettre d’analyser de la déficience et des différents troubles cognitifs de la victime.
Pour autant, ce n’est pas tout il convient également de produire les bilans de l’ensemble des thérapeutes du patient, à savoir, les orthophonistes ou ergothérapeutes, qui permettront un regard différent sur le handicap de l’accidenté. Leurs informations seront pas négligeables.
Il est important que ces comptes-rendus précisent l’évolution du cérébro lésé et ceux persistants comme les troubles dysexécutifs, et leur retentissement sur l’autonomie de la victime.
Leurs observations sur le comportement du patient dans sa vie de tous les jours, son agressivité, ses débordements, son inadaptation sociale en fonction des situations, ses troubles de la mémoire, etc…
L’expert devra établir un bilan fonctionnel en décrivant les mouvements, gestes et actes rendus difficiles ou impossibles.
Il devra donc et à la lumière des éléments précédemment indiqués, décrire avec précision le déroulement d’une journée en cas de retour à domicile.
L’expert va devoir évaluer la capacité de la victime à prendre conscience de son état et à appréhender l’environnement. Donner tous renseignements utiles sur la nature et le degré de cette conscience.
De la même manière l’expert va devoir préciser si une hospitalisation à vie doit être envisagée et, dans l’affirmative, dans quelle structure. Et en cas de possibilité de retour à domicile, il devra dire quels moyens techniques palliatifs sont susceptibles d’accroître l’autonomie de la personne blessée (appareillage, aide technique, aménagement du logement et ou du véhicule…).
L’expert devra être très précis sur les besoins en tierce personne en indiquant la qualité, la qualification professionnelle requise, la fréquence et la durée d’intervention quotidienne.
Enfin, une attention particulière sera exigée pour que l’expert précise la situation professionnelle (ou scolaire) de la victime avant l’accident, ainsi que le rôle qu’auront joué les conséquences directes et certaines de l’accident sur l’évolution de cette situation : reprise de l’emploi antérieur, changement de poste, changement d’emploi, nécessité de reclassement ou d’une formation professionnelle, possibilité d’un travail adapté. Inaptitude absolue et définitive à toute activité rémunératrice.
Ces éléments seront rajoutés à la mission classique d’expertise.